Bonjour Jérôme Le Gall, comment allez-vous dans cette période qu’on annonce un peu compliquée pour la construction?

Personnellement je vais bien, merci. J’ai effectivement conscience que nous commençons une période délicate. L’activité actuelle chez SOFRADI est cependant bonne. Le carnet de commande avant COVID était plutôt rempli, je serais plus prudent pour les mois à venir. Nous sommes plutôt regardants sur le marché 2021 et la façon dont il va évoluer. Nous sommes donc attentifs tout en restant sereins.

Pouvez-vous vous présenter, vos 3 points forts personnels et professionnels ?

Je suis avant tout un généraliste. Je m'efforce de voir large et loin. Je peux passer dans une même journée du commercial, aux travaux, à la veille, à la RH, aux finances, etc.

Je suis aussi quelqu’un de curieux, j’ai une appétence pour la nouveauté.

Enfin, je prends un vrai plaisir à manager les gens. Je n’ai pas de lassitude, c’est un vrai beau métier. C’est important de conserver cette envie, car les gens comptent sur nous.

Pouvez-vous nous raconter comment vous avez intégré SOFRADI et quelle est sa principale caractéristique ?

Je suis ingénieur travaux issu de l’Ecole Centrale de Nantes. J’ai commencé à travailler en 1995 au sein du groupe Bouygues en région parisienne, en gestion, puis comme conducteur de travaux. J’ai rejoins Bouygues Immobilier en 1999. Je suivais les chantiers et réalisais les opérations pour le compte du promoteur. Je suis entré chez SOFRADI en 2004, avec, à l’origine, la responsabilité de l’enveloppe du bâtiment. J’ai donc fait de l’entreprise générale, de la promotion et maintenant je suis dans une entreprise sur un corps d’état spécifique, cela me permet d’avoir un œil assez complet de la chaîne de décision de la construction.

De son côté SOFRADI a 43 ans, c’est donc une entreprise assez ancienne. SOFRADI, cela veut dire Société française d’isolation, l’isolation est bien notre cœur de métier.

Il y a 3 ans, nous avons créé un poste de Directeur Général Exécutif pour accompagner la croissance de l’entreprise et j’ai été amené à prendre ces fonctions.

SOFRADI est une entreprise un peu particulière de 250 salariés dont 50 salariés sont actionnaires. Nos salariés actionnaires sont des cadres, des ETAM et aussi des ouvriers. Il ne peut y avoir d’actionnaire ayant plus de 15% des parts, ce qui fait que l’actionnariat est très diversifié. Le partage chez nous est chevillé aux corps. Les décisions stratégiques sont collectives et on tient à cela. 

Pouvez-vous présenter SOFRADI un peu plus en détails ? (produits, cible, culture d’entreprise…)

Le chiffre d’affaires est de 50 millions d’euros. Nous sommes un des leaders français de l’isolation frigorifique, dans le TOP5 national et nous sommes l’un des leaders régionaux pour la façade et l’enveloppe.

Nous avons quatre grand métiers :

  • La façade et l’enveloppe du bâtiment.
  • L’isolation frigorifique pour le secteur agro-alimentaire.
  • Les plafonds cloisons modulaires pour l’immobilier tertiaire.
  • Et l’isolation thermique et acoustique pour l’industrie.

Pour ce qui est de notre culture, nous avons décidé de co-écrire nos valeurs avec nos salariés. Nous sommes allés à leur rencontre et leur avons, par exemple, demandé individuellement pourquoi ils étaient venus chez SOFRADI et les raisons qui feraient qu’ils partiraient. Il fallait oser!

Le résultat a été à la hauteur.

Ce qui en découle, ce sont nos quatre valeurs « souche » : le savoir-faire technique, l’ambition, le partage et l’humain. Chaque valeur est portée par quatre principes opérationnels compréhensibles par tous. Nous avons ainsi 16 principes en tout. Par exemple, « l’entreprise ouvre son capital à tous ses salariés » est l’un des principes attachés à la valeur du partage. Cela permet d’être dans le concret et l’opérationnel.

Quel est votre rôle, votre contribution au sein de SOFRADI ?

Mon rôle est d’accompagner la croissance de l’entreprise en validant sa stratégie et en définissant l’organisation idéale pour y arriver. Je dois aussi être en veille sur les marchés de demain et permettre à chaque collaborateur de se réaliser pour idéalement être acteur du développement de l’entreprise.

En définitive, mon rôle est de faire la synthèse des différentes énergies positives de l’entreprise.

Justement, pourriez-vous nous en dire plus sur votre style de management ?

Nous avons créé un baromètre social dans l’entreprise. Ce qui en ressort, c’est que le management dans l’entreprise est plutôt ouvert, il repose sur la confiance et l’ouverture. Le manager chez SOFRADI a pour mission d’écouter, de faire la synthèse et puis de décider.

Cela me permet de parler de notre « raison d’être » : « un collectif au service de l’humain ». Les managers travaillent de façon collective, il sont là pour permettre à chacun de s’épanouir dans son métier et pour faire grandir les équipes.

Qu’est-ce qui vous différencie de vos concurrents ? Quel est le point fort de SOFRADI ?

Notre différence c’est que nous avons une expertise de l’isolation dans tous les métiers.

Nous avons capitalisé un savoir-faire qui fait que nous sommes bien connus sur nos marchés et nos clients bénéficient ainsi de notre capacité à croiser nos nombreuses compétences.

Je mentionne aussi la forte implication de nos équipes comme un véritable point fort. Nos clients aiment bien les sofradiens et en redemandent !

Quelle place accordez-vous à l’innovation et à la R&D ?

Jusqu’à maintenant, nos démarches d’innovation étaient enclenchées en fonction des demandes de nos clients.

Notre métier est de rendre possible le dessin de l’architecte, c’est une innovation pragmatique. Nous nous appuyons sur des solutions existantes, nous n’hésitons pas à proposer des variantes, l’objectif étant de rendre concrètes des idées parfois fort complexes.

Depuis un an, nous sommes plus pro-actifs. Nous avons désormais 2 personnes en charge de la R&D dans l’entreprise. Elles sont en veille sur les évolutions et nous aident à aller au devant des appels d’offre. C’est comme cela que nous avons beaucoup avancé sur le BIM.

C’est primordial de suivre les évolutions techniques, d’être en veille sur les nouveaux matériaux, c’est de nature à conforter notre place de leader.

Quand on parle d’innovation, je pense à ce que nous avons fait pour le siège du groupe LEDUF, porte de Rennes à Nantes, avec l’architecte parisien Atelier 2/3/4. Nous avons fait une proposition de façade animée tout en restant à un coût maîtrisé. Nous avons par exemple réalisé des ouvrants parallèles.

Siège du Groupe LEDUFF - Rennes (35) - Maître d´ouvrage : Linkcity Grand Ouest - Architecte : Ateliers 2/3/4/ - Entreprise générale (mandataire) : Bouygues Bâtiment Grand Ouest

Nous avons créé avec l’architecte une nouvelle façade qui répond parfaitement aux enjeux esthétiques, acoustiques, thermiques et à l’étanchéité à l’air.

SOFRADI intègre-t-elle une démarche d’atténuation, d’adaptation, de transformation face aux dérèglements climatiques ?

Ce n’est pas intégré de facon aussi simple que vous le présentez.

Nous ne sommes pas maître d’oeuvre, nous répondons à des clients, ce qui implique que sur les questions de développement durable, comme pour les autres questions, nous répondons à une commande. Pour autant, dans notre fonction de conseil nous pouvons avancer des propositions et des alternatives. Nous commençons à regarder de près le poids carbone, notamment avec l’appui de Novabuild.

Nous sommes persuadés de l’importance de bien prendre en compte les enjeux du développement durable. Je ne doute pas que nous ferons encore mieux dans l’avenir. J’ai en projet de notamment nous appuyer sur des Startups qui viendront nous challenger.

Je vous indiquais tout à l'heure que notre raison d'être est de créer des solutions isolantes au service de l'humain. Nous avons donc clairement un rôle à jouer sur la question écologique. Je pense en particulier à ce que nous faisons pour l'industrie de façon à lui permettre de consommer moins d'energie. Nous sommes un véritable acteur de la transition énergétique pour nos clients.

Nos parois sont parfois très technologiques. Nous cherchons à mieux récupérer l'energie du soleil et à la restituer au bâtiment, quand il le faut, où il le faut. Nous savons modéliser des parois bioclimatiques, les construire et les poser. 

Je pense, par exemple, à ce que nous faisons en ce moment pour les sièges de Bati Nantes et d'ETPO à Nantes dessiné par l'agence Barré-Lambot Architectes, avec une double peau, composée à l’intérieur d’une lame d'air pouvant être fermée en hiver et ventilée l'été à l’aide d’ouvrants motorisés.

ILOT 3D - Nantes (44) - Maître d'ouvrage : BatiNantes / ETPO - Architecte :  Barré-Lambot Architectes

Une question maintenant sur votre territoire. Quel est votre port d’attache ? Est-ce que vous pouvez décrire votre relation à ce territoire ? Ce qu’il vous apporte ? Ce que vous lui apportez ?

Nous faisons 80% de nos activités sur les Pays de la Loire et la Bretagne.

Nous nous appuyons sur le dynamisme du Grand Ouest. Nantes et sa Region sont porteurs de beaux projets qualitatifs qui ont font grandir toute la profession.

A noter aussi que, dans le Grand Ouest, on retrouve une industrie agro-alimentaire très présente et active et qui a besoin de solutions d’isolation adaptées.

Le territoire, ce sont aussi des femmes et des hommes. Notre entreprise est en croissance depuis plusieurs années et joue pleinement son rôle pour intégrer l’emploi. Nous recrutons de nombreux apprentis chaque année.

Nous sommes également actifs sur les questions d’insertion avec des personnes parfois éloignées de l’emploi. Nous sommes membres du GEIQ, groupement d'employeur pour l'insertion et la qualification. Nous sommes persuadés que l’entreprise a un rôle social à jouer. Nous aimons bien les histoires où les plus faibles ne sont pas oubliés.

Enfin, nous sommes très présents dans les réseaux locaux comme Novabuild par exemple.

Auprès de qui ou de quoi allez-vous puiser votre énergie quand vous en avez besoin ?

Honnêtement, la première image qui me vient, ce sont mes salariés. L’entreprise m’énergise. Nous avons accueilli de nombreux nouveaux salariés ces dernières années qui nous donnent une énergie incroyable.

Et, pour tout vous dire, j’aime bien me promener seul en forêt, la nature me restitue son énergie, dans le calme et la sérénité.

Pouvez-vous évoquer pour nous votre plus bel accomplissement professionnel ?

Je pense à la création du poste de Directeur Général Exécutif que mes pairs ont créé il y a quelques années et qu’ils m’ont confié. Cette marque de confiance est une vraie belle réussite. Du jour au lendemain, de simple collègue, je devenais, à leur demande, leur responsable. On voit bien ce que cela peut impliquer pour tous. Par facilité, ils auraient pu choisir un recrutement externe, les promotions internes sont ce qu’il y a de plus difficile. Je m’efforce tous les jours d’être à la hauteur de cette confiance qui m’a été accordée.

Autre réussite professionnelle, l’immeuble Sully, à Nantes, pour le Conseil Départemental de Loire-Atlantique. Il s’agissait d’une ancienne usine électrique qui faisait partie du patrimoine de la ville. L’agence d’architecture Forma6 voulait une façade très contemporaine qui puisse répondre au patrimoine environnant, tout en apportant un confort bioclimatique aux usagers puisque nous devions éviter le recours à la climatisation. Les cassettes de parement sont en inox que nous avons pré-découpé au laser dans nos ateliers selon un dessin original de l’artiste Béatrice Dacher. C’est une belle réussite technique pour SOFRADI, une de nos plus belles références que chaque nantais peut voir tous les jours.

Reflets de l'Erdre - Rue Sully, Nantes (44) - Maître d'ouvrage : Conseil général de Loire-Atlantique - Architecte mandataire, Paysagiste : forma6 - Artiste : Béatrice Dacher

Et le pas de côté que vous n’avez pas encore fait, que vous aimeriez faire ?

Le véritable pas de côté pour moi, ce serait de parvenir à sortir plus de mon entreprise pour prendre une mission complémentaire pour m’éclairer encore plus, et quitter un peu l’opérationnel. J’aimerais pouvoir dégager du temps pour porter une mission plus large. Je suis en phase avec l’adage : « Qui sort s’en sort ».

Quelle est votre vision de l’avenir de la construction ?

Je suis optimiste. Nous avons un champ des possibles important. Je vois des bâtiments de plus en plus sobres, résilients, des cycles courts, l’utilisation plus importante de matériaux locaux, et une présence en amont plus forte des usagers qui seront plus acteurs de la construction de leur ville et de leurs bâtiments. Nous avons à inventer les bâtiments de demain.

Nous devons notamment avoir plus de liens avec les métiers de la mobilité. Les transports autonomes et les bâtiments connectés sont à mettre en relation, ils s’impactent mutuellement.

Les enjeux écologiques et sociétaux de demain doivent nous amener à faire des bâtiments plus poreux, permettant une porosité sociale. Le bâtiment doit permettre de réunir les gens, de limiter les distances sociales.

Et puis, je ne voudrais pas qu’on oublie le plaisir, il faut que nos constructions apportent du plaisir, de la lumière, des ambiances chaleureuses.

Jérôme Le Gall, vice-Président de NOVABUILD

Jérôme LE GALL

Vous êtes membre de Novabuild, quels bénéfices en retirez-vous ?

Nous retirons plusieurs bénéfices de notre adhésion.

En premier lieu, vous nous apportez une veille permanente sur les marchés de l’acte de construire. Sans Novabuild, je n’aurais pas autant d’information sur les marchés d’aujourd’hui et de demain.

Novabuild c’est aussi le réseau. On se rend compte avec vous que le champ des possibles est énorme et on prend conscience, qu’en Pays de la Loire, nous sommes nombreux à vouloir construire mieux.

Avec Novabuild nous pouvons bénéficier d’un accompagnement sur des sujets que nous voulons approfondir.  Pour le BIM par exemple, nous avons pu être formés et nous avons pu monter en compétence.

En tant que Trésorier et vice-Président de l’association, je peux partager avec mes confrères une vision du monde de demain. Cela permet que les choix que je fais pour l’entreprise ne soient pas déconnectés des tendances. Novabuild est vraiment une vigie des enjeux du monde de demain.

Et, pourquoi ne pas le dire, je prends un vrai plaisir à chaque rencontre, de l’énergie et du plaisir.

Une belle rencontre avec Novabuild…

La rencontre avec Marika Frenette. C’est quelqu’un qui apporte beaucoup, qui a une vision reposant sur une double culture, française et canadienne, une exigence de ce qu’on doit mettre en œuvre, des méthodes de travail, une vraie vision de demain.

Marika Frénette, vice-Présidente de NOVABUILD

Marika FRENETTE

Je vous remercie d'avoir répondu à ces questions.

Propos recueillis par Pierre-Yves LEGRAND, Directeur de Novabuild, le 18 septembre 2020


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