
Pour des réseaux de chaleur renouvelable "au pied des bâtiments" | Rencontre avec Thierry LOIZEAU, IZEAU
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Adhérent
NOVABUILD
IZEAU SAS
Assistant à Maîtrise d'Ouvrage
ST ETIENNE DE MONTLUC (44360)
Témoignages

Bonjour Thierry LOIZEAU, comment allez-vous dans cette période de crise sanitaire et diplomatique, doublée d’incertitudes économiques, sans oublier la crise climatique qui s’accentue ?
Bonjour Pierre-Yves. Je vous remercie de m’accorder cette opportunité pour présenter l’entreprise. IZEAU a été créé quelques semaines avant le COVID avec une volonté d’apporter notre pierre à l’édifice dans lutte contre règlement climatique. La crise du Covid a été une sorte de stress test. Ce que je retiens de ce moment particulier, c’est qu’il faut croire en son projet, quelles que soient les conditions qui se présentent. Mais cela va bien maintenant.
Pouvez-vous vous présenter, et nous communiquer vos 3 points forts personnels et professionnels ?
Je suis quelqu’un qui s’inscrit sur du temps long. Quand je regarde mes expériences passées, on voit une forme de fidélité et de loyauté dans les actions qu’on me confie. J’ai eu l’occasion de travailler pendant près de 15 ans pour une PME nantaise, la Nantaise des Eaux Services. J’y suis arrivé comme simple commercial, et à la suite d’un parcours complet, j’en ai été le Directeur général. Cette entreprise a connu sur cette période un fort développement jusqu’à son rachat par un grand groupe.
Pour rebondir sur la question de la crise sanitaire, une autre qualité serait une forme de résilience, une capacité à s’accrocher dans les périodes de doute, une capacité à mener à bien des projets, quand bien même l’environnement n’est pas favorable.
Je suis aussi quelqu’un qui est dans l’action. C’est mon ADN et celui de l’entreprise. Nous sommes dans le faire.
Pouvez-vous nous raconter pourquoi vous avez créé IZEAU ?
Mon fil conducteur, depuis que je travaille, a été d’œuvrer dans les services à l’environnement. J’ai exercé plusieurs métiers, pour des grands groupes ou des PME. J’ai commencé par la gestion des déchets pour VEOLIA en région parisienne. J’y suis resté plusieurs années. Dans les années 2003-2006, nous avons fait le choix avec mon épouse de revenir dans ma région d’origine, les Pays de la Loire, et j’ai rejoint une PME dans l’eau et l’assainissement.
Je suis désormais dans les services énergétiques, la boucle est peut être bouclée. Après plus d’une vingtaine d’années dans le monde du salariat, j’avais la volonté de créer ma structure. Par le biais de rencontres, le projet de création de l’entreprise IZEAU a vu le jour, spécialisé sur la chaleur renouvelable, à destination des collectivités et des acteurs de la ville.
Pouvez-vous présenter IZEAU ?
Comme je vous l’indiquais tout à l’heure, IZEAU a été créé quelques semaines avant le COVID. Nous sommes installés dans une pépinière d’entreprise à St Étienne de Montluc (Loire-Atlantique), près du centre de formation d’ENEDIS et de GRDF. Notre équipe est constituée de 3 personnes.
Nous sommes spécialisés dans la production et la distribution d’énergie renouvelable pour l’habitat collectif et le tertiaire, d’une taille de 15 à 300 logements. Nous nous adressons au marché dit de de moyenne puissance, soit des immeubles qui ont un besoin de 300 kw à 2 mégawatt.
Nous intervenons comme conseil et opérateur d’exécution des travaux pour des clients privés, des collectivités et des concessionnaires.
Notre ambition est d’accompagner les acteurs de la ville dans l’installation de mini réseaux de chaleur provenant d’énergie décarbonée. Nous venons d’installer des chaudières bois-énergie « au pied des bâtiments » en missionnant des tuyauteurs-soudeurs. Nous sommes amenés à concevoir et à dimensionner les installations, puis nous venons coordonner les chantiers qui nous sont confiés, et, le cas échéant, à nous positionner comme tiers-financeurs. Nous pouvons aller jusqu’à favoriser le démarrage d’une filière locale d’approvisionnement, en faisant le lien avec FIBOIS Pays de la Loire notamment.
Quel est votre rôle, votre contribution au sein de votre structure ?
Nous sommes sur un marché naissant qui nécessite un fort besoin d’évangélisation. L’offre de chaleur renouvelable de moyenne puissance n’est pas encore connue. Les collectivités ont du mal à le faire émerger pour des raisons économiques. Il nous faut aider nos interlocuteurs à trouver un modèle économique, comme par exemple aller voir les promoteurs qui peuvent rencontrer des difficultés avec le gaz. La solution bois-énergie a de nombreux atouts. Elle est locale et durable, sans problématique d’approvisionnement.
Et pour répondre à votre question, je dirais donc que mon rôle est d’ « évangéliser ». Il faut en permanence que je fasse connaître ce qu’est la chaleur renouvelable au pied d’un bâtiment.
Quelles sont les cibles ou les marchés d’IZEAU ? Quelle est sa place sur son marché ?
L’ADEME rappelle que le chauffage et l’eau chaude représentent plus de 70% des dépenses d’énergie d’un foyer français. IZEAU se positionne sur le volet primaire de l’énergie : la production et la distribution au pied du bâtiment.
Nos cibles sont d’une part la création de chaufferies de moyenne puissance, d’autre part la densification d’un réseau existant pour lequel on posera un échangeur thermique, qu’on appelle un "skid", au pied d’un bâtiment. On le fait pour les agglomérations de Nantes, Angers, Rennes et Bordeaux. Là où il y avait auparavant une chaudière gaz, nous venons raccorder des sous-stations, et poser le Skid que l’on raccorde à un réseau de chaleur.
Qu’est-ce qui vous différencie de vos concurrents ?
Là où nous sommes, au pied de l’immeuble, il y a peu de concurrence. Mais, il faut bien le dire, aujourd’hui, il y a aussi peu de marchés. Quelque part, je me féliciterais d’avoir plus de concurrence.
Étant positionnés sur le volet primaire de l’énergie, nous ne faisons pas partie des acteurs classiques du génie climatique. Nous sommes plutôt en co-activité avec eux. Nous avons un intérêt commun à faire connaître cette offre. La multiplication des offres d’énergie en local pourrait entraîner une dynamique, en tous cas, c’est ce que j’espère.
Quelles sont les 2-3 réalisations dont vous êtes le plus fier ?
Je vous faisais part tout à l’heure de nos réalisations dans les grandes métropoles.
Notre premier projet, en 2020, a consisté à raccorder les locaux du ministère des affaires étrangères à Nantes. Il se trouve que la chaufferie n’est pas en sous-sol mais en toiture-terrasse. Il a fallu bloquer la rue pour sortir les vieilles chaudières gaz, et installer le skid en hauteur. C’est une belle référence, j’en suis particulièrement fier.
Nous avons eu la chance de raccorder un industriel à Angers. Ce n’est pas la complexité technique qui comptait sur ce projet, mais celle du dossier à constituer, avec toutes les demandes d’autorisation! Il a fallu mobiliser plusieurs types d’entreprise pour mener à bien le projet. Cela nous a permis de professionnaliser notre process.
L’été dernier, nous sommes intervenus sur le théâtre le Quai à Angers, avec sa chaufferie en terrasse surplombant la Maine.
Cela a été l’occasion de sensibiliser les élus aux réseaux de chaleur.
Quelle place accordez-vous à l’innovation et à la R&D ?
Ce n’est pas une question simple pour une structure de notre taille. Nous sommes dans un marché naissant et en développement.
Nous nous appuyons sur des techniques Low-Tech. Je ne crois pas au techno-solutionnisme. Nous ne cherchons pas des technologies qui vont tout révolutionner. Brûler du bois déchiqueté est quelque chose d’éprouvé, comme poser des échangeurs thermiques.
Notre innovation est donc plutôt commerciale. Nous venons assembler et proposer une offre clé en main pour nos clients. L’innovation, pour nous, ce sera aussi un jour de proposer et mettre en place du tiers financement.
Sur les technologies, nous sommes à l’écoute des appels à projets auxquels nous pourrions être associés, sur la biomasse ou le solaire thermique.
Votre structure intègre-t-elle une démarche d’atténuation, d’adaptation, de transformation, face aux dérèglements climatiques ?
Cette question est en lien avec la genèse d’IZEAU.
Quand j’ai quitté la Nantaise des Eaux Services, il y avait 300 collaborateurs et 150 contrats de délégations de service public. J’ai fait un break, lu des livres, et suivi des cours de Jean-Marc Jancovici. Cela a marqué mon projet. J’ai pris conscience que le temps de la parole est passé, il faut être dans l’action.
Mon entreprise a vocation à répondre à ces enjeux, et à mener des actions très concrètes pour nos clients et nos partenaires. Nous souhaitons apporter des réponses de A à Z ou plutôt de de Z à A, comme IZEAU. Le fait d’installer une chaudière biomasse et de raccorder des bâtiments à un réseau de chaleur nous amène à être un acteur de l’atténuation et de l’adaptation.
Pourriez-vous nous faire part d’engagements que vous avez pris personnellement, ou en tant que dirigeant d’entreprise, en lien avec les questions climatiques ?
J’ai adhéré en 2019 au mouvement des shifteurs de Nantes. Cela me permet de sensibiliser tous mes contacts. Que ce soit au café ou au déjeuner, je saoule tous mes amis là dessus !
J’estime aussi que c’est dans ma mission que d’aller sensibiliser autour de moi. J’interviens sur des formats de deux jours auprès d’étudiants en école de commerce. Je leur apporte les ordre de grandeur, notamment ce que sont les différentes énergies, leur impact, pour que tout le monde ait une forme de vernis pour comprendre les enjeux du moment.
Quelle vision portez-vous sur l’avenir du bâtiment, de la ville, des aménagements ? Quelles tendances voyez-vous émerger ?
Si je reviens aux réseaux thermiques, les réseaux de chaleur sont des véritables outils d’inclusion énergétique et de lutte contre la précarité énergétique. Les quartiers nord des métropoles, les quartiers précaires de ces villes, ont été les premiers à être raccordés aux réseaux de chaleur. Les populations peuvent bénéficier de prix de l’énergie qui sont déconnectés de la volatilité du prix du gaz.
Je suis plutôt optimiste sur l’avenir de la ville. Les réseaux de chaleur, ou les mini réseaux de chaleur avec 4-5-6 immeubles connectés, sont une façon d’amener de la chaleur renouvelable. Demain, on aura des sources de chaleur délocalisées et renouvelables. Je pense que cela va émerger car le gaz n’est plus la solution, et les seuils de la RE2020 au-delà de 2025 vont empêcher l’utilisation d’une unique source de gaz. IZEAU est à côté des architectes, des promoteurs et autres acteurs du bâtiment pour réfléchir à la manière de produire et d’amener la source de chaleur sur un territoire, sur une ZAC.
Une question maintenant sur votre territoire. Quel est votre port d’attache ? Est-ce que vous pouvez décrire votre relation à ce territoire ? Ce qu’il vous apporte ? Ce que vous lui apportez ?
Je suis Vendéen d’origine. Mon réseau et mes engagements sont sur Nantes. Je suis membre d’associations comme les dirigeants commerciaux de France. La place des réseaux à Nantes est primordiale.
Un projet d'entreprise ne peut exister isolé des autres, il nous faut participer à des écosystèmes pour faire fructifier ce que nous sommes et notre entreprise.
Je suis aussi président du VTT nantais, un club qui a 30 ans
Auprès de qui ou de quoi allez-vous puiser votre énergie quand vous en avez besoin ?
Je puise mon énergie dans ma famille et auprès de mes amis. Nous avons avec mon épouse la passion de la randonnée. Il y a quelques années, nous avions grimpé le Kilimandjaro. Nous partons régulièrement en autonomie pendant plusieurs jours et nous parcourons les sentiers de grandes randonnées (Ecrins, Queyras, Mercantour, Cantal, Corse, Vosges…). L’objectif est d’avoir à termes bouclé tous les GR de France!
Et le pas-de-côté que vous n’avez pas encore fait que vous aimeriez faire ?
Ce serait peut-être d'enseigner. Nous n’avons pas d’enfant avec ma femme, et la transmission par l’enseignement serait ce pas de côté.
Vous êtes membre de NOVABUILD, quels bénéfices en retirez-vous, en attendez-vous ?
IZEAU est une structure de taille modeste, NOVABUILD est pour nous une bouffée d’oxygène. J’ai participé au NOVA'meeting. NOVABUILD est notre outil de veille. Vous êtes une vraie boîte à outils, on vient y piocher des outils de formation, et de la veille en permanence. Et en plus, on y retrouve une possibilité de rencontre avec des prospects.
Pouvez-vous raconter une belle rencontre que vous avez faite avec NOVABUILD ?
Je suis arrivé à l'occasion de l’Assemblée Générale que vous avez organisée pour fêter vos 10 ans. C’était un moment exceptionnel ! J'ai échangé avec Prudence SOTO (SAUTER Régulation) qui était elle aussi nouvelle adhérente. Mon premier verre, je l'ai partagé avec Florent LOUSSOUARN, Pouget et Ewen RABALLAND, Etamine.
Je vous remercie d’avoir bien voulu répondre à nos questions.
Propos recueillis par Pierre-Yves LEGRAND, directeur de NOVABUILD, le 16 septembre 2022
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