Le commerce éco-engagé, acteur de la ville de demain | Rencontre avec Olivier DARDE, PLEIN CENTRE

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Publié le

14/12/2020
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Sur la question climatique, il y a une demande réelle des clients, aujourd'hui, il y a aussi des constats que nous faisons l'été, où les rues écrasées de lumière et de chaleur ne sont plus propices à la vente, nous pensons donc qu'il faut y aller, il faut évoluer dans nos pratiques, c'est de notre intérêt.
Olivier Dardé, Président de l'association PLEIN CENTRE
Je ne crois pas aux injonctions, nous cherchons à accompagner les commerçants, dans l’écoute et la bienveillance, mais avec ambition.
Olivier Dardé

Bonjour, comment allez-vous dans cette période de crise sanitaire, doublée d’une crise économique, sans oublier la crise climatique qui s’accentue ?

Vous avez raison. Le monde est dans une configuration particulière qui nous amène à être combatifs dans cette période qui modifie profondément nos activités.

Pour garder notre optimisme, le fait d’être combatif est une aide puissante. Le commerce de centre-ville a l’habitude de s'adapter, notamment devant l'évolution des consommateurs. Cela se traduit dans la capacité d’intégrer des données, la mise en place de nouvelles idées, de nouvelles façons de faire du chiffre d'affaires, etc.

Mon activité professionnelle a quant à elle beaucoup évolué récemment. J’ai vendu mon restaurant. Aujourd'hui, je dirige l'entreprise Somewhere to Meet basée à St-Herblain. Nous concevons et faisons de la promotion de résidences seniors et d'hôtels. Je n'ai pas vraiment changé de métier, mais je l'exerce sous un autre angle.

Pouvez-vous vous présenter, vos 3 points forts personnels et professionnels ?

Je suis cuisinier à la base, depuis l’âge de 16 ans, issu d´une formation de restauration et hôtellerie . J’ai toujours été dans ce cœur de métier. Je suis très impliqué dans mon  métier, je suis un passionné avant tout.

J’ai eu la chance de faire le tour de France en compagnonnage.  Les compagnons m’ont transmis les valeurs humaines et les valeurs du travail.

Les compagnons, cela a du sens également dans les métiers de la construction.

Pouvez-vous nous raconter comment vous avez intégré l'association PLEIN CENTRE ?

J’ai eu l’occasion d’être vice-Président pendant 2 années aux cotés de ma prédécesseure, Nathalie Deniau-Millon. C’était une période en mouvement, avec les manifestations hebdomadaires de Notre-Dame des Landes. Ces manifestations récurrentes de semaine en semaine ont été pour moi une formation accélérée.

J'ai pris la présidence il y a 3 ans, en 2017. J’avais travaillé sur beaucoup de dossiers et de sujets différents : la particularité d'une association comme la nôtre est d'avoir à parler aussi bien aux consommateurs, aux institutionnels qu'aux politiques. Quand on en est le Président, on doit comprendre comment cela fonctionne.

Cela demande beaucoup d’écoute, de repérer les options qui sont possibles ou pas, et de repérer qui peut nous accompagner.

Nos adhérents sont d'une grande diversité, cela va des petites boutiques ciblées à des "grosses machines de guerre". Je dois faire en sorte que chaque individualité appartienne au collectif.

En résumé, je peux vous donner ma feuille de route en tant que Président : "Des commerçants unis pour un centre-ville de Nantes vivant et attractif".

Pouvez-vous présenter l'association PLEIN CENTRE ?

Plein Centre est une association avec 430 adhérents de l’hyper-centre de Nantes. 19 membres participent au Bureau de l'association, et nous avons 4 salariés à plein temps, Nous avons deux vocations : animer le centre-ville et parler aux consommateurs, et représenter les commerçants dans toutes les instances où l’on parle commerce.

Quel est votre rôle, votre contribution au sein de votre structure ?

Le Président n’oublie pas qu’il est là pour représenter ses membres dans leur diversité, être leur porte-parole, et se projeter du côté des consommateurs. Je m'efforce d'aider les adhérents avec des consommateurs qui évoluent, et donc les former aux évolutions à venir. Nous devons avoir une projection à 3 ans, tout en étant dans le présent.

C’est valable pour le développement durable, on se projette à 3 ans, on lance des projets d'amélioration, et l'on est rattrapé par le présent avec la COVID 19, et des entreprises qui se trouvent en difficulté, des décisions qui bousculent tous nos plans, des incertitudes qui empêchent de voir loin.

Avec l'association PLEIN CENTRE, on se bat pour le bien commun, pour le centre-ville. Il faut le sauver, il y a du patrimoine, de la culture, de l'urbanisme, de la vie, tout est en lien.

Quelle est la ou les cible(s) de votre structure ? Qu’ont-ils en commun ?

Nous avons trois cibles : les adhérents qui sont mes clients, le consommateur final (situé jusqu’à une heure de voiture de l'hyper-centre), et les acteurs économiques et institutionnels qui font la ville au quotidien. Cela nous met au cœur de beaucoup de sujets.

J’étais par exemple la semaine dernière au ministère de l’Intérieur pour échanger sur les questions de sécurité.

Quelle est votre place par rapport à d'autres associations équivalentes ?

Pour tout vous dire, pendant les gilets jaune, nous nous sommes regroupés sur la plateforme WhatsApp avec des associations équivalentes de grandes métropoles. Depuis novembre de l’année dernier, nous avons monté CAMF (Commerçants et Artisans des Métropoles de France) qui regroupe 17 grandes villes de France. Nous représentons 10 000 commerçants.

Désormais, nous avons une assez bonne vision de ce qui se passe dans d'autres villes, car nous échangeons beaucoup entre nous. Ce qui nous regroupe, ce sont les 3 cibles que j'évoquais tout à l’heure.

J’ai constaté que nous avions clairement de l’avance sur la transition écologique, sur les animations, sur les sujets de digitalisation et sur les sujets de conciergerie. Sur ces questions d'anticipation et d'évolution, il y a vraiment une avance de Nantes et de l'association Plein Centre.

Le bureau de l'association PLEIN CENTRE
 

Et par rapport à d'autres associations de commerçants situées sur des territoires en proximité du vôtre (autres villes de l'agglomération nantaise, etc.) ?

Vous avez raison de poser la question. Je défends l’idée de raisonner à l’échelle de la métropole. Il y a de nombreuses associations de commerçants dans la métropole, nous devons plus dialoguer entre nous. Par exemple, si vous connaissez Nantes, je peux parler du quartier de la Cathédrale, mais pas de la rue Joffre, qui est à deux pas!

Nous devons aussi intégrer dans notre réflexion toutes les autres activités qui font la ville. Je rêve d'une association qui regrouperait toutes les activités. Si l’on veut parler aux gens qui sont situés à une heure de voiture de nous, il faut leur parler sans cloisonnement de culture, de sport, de commerce, de patrimoine, d'activités gratuites, de loisirs, etc.

Quel est selon vous le point fort de l'association PLEIN CENTRE ?

Je considère que notre objectif est de faire venir du flux. Le centre-ville de Nantes est en souffrance avec 5 ans de manifestations le week-end et deux périodes de confinement. Il faut que les fondamentaux soient en place pour faire venir des flux, et je parle en premier lieu de la sécurité, on se bat à toutes les échelles pour régler cela. Il y a aussi la propreté qui s’est améliorée, et puis, il y a la qualité de l'offre qui est fragilisée avec ces cinq années particulièrement pénibles. Le centre-ville d'une agglomération comme Nantes ne peut pas être qu'un lieu de bureaux et de logements, notre rôle est de l'animer, de lui donner vie.

Atelier PLEIN CENTRE "Le réchauffement climatique pour mon commerce nantais"
 

Pour cela, le projet que je tente de mettre en oeuvre est de pousser à la digitalisation avec un site de market-place dans lequel on retrouverait l’éco-engagement, les chèques cadeaux qui doivent être dématérialisés (et qui montrent bien que les emplois locaux sont chez nous), la logistique urbaine, et tous les services qui font la ville au quotidien.

Ces différents projets, avec en particulier l'éco-engagement des commerçants, nous amènent déjà à être repérés à l’échelle nationale.

Quelle place accordez-vous à l’innovation et à la R&D ? 

La question de l'innovation n'est pas forcément très simple pour nous. Nous devons regarder loin, préparer les évolutions, et à tout moment nous pouvons être rattrapés par le présent. Nous avons aujourd'hui des adhérents qui souffrent directement de la COVID, et avec lesquels vous comprendrez très bien que je ne vais pas parler de la ville dans 10 ans!

Pour autant, il nous faut imaginer ce que sera le commerce de demain, avec par exemple un réseau de dépôts autour de l'agglomération pour approvisionner le centre-ville en mode doux, des clients qui font leur course pendant la journée en laissant les objets achetés chez le commerçant, et qui les retrouvent le soir, soit dans une conciergerie, soit à leur domicile, livrés en vélo cargo à 20h. Je pense aussi à des horaires d'ouverture plus amples, un éco-engagement partagé par tous, des surfaces commerciales repensées (j'ai constaté qu'elles sont occupées aujourd'hui à 30% pour entreposer les stocks), un lien continue entre achat en présentiel et plateforme numérique, etc. Vous voyez, les projets ne manquent pas, et tous nécessitent de rassembler des partenaires différents.

Votre structure intègre-t-elle une démarche d’atténuation, d’adaptation, de transformation, face aux dérèglements climatiques ?

Cette question du changement climatique est très importante pour nous. Nous avons créé en 2019 une Charte des artisans et commerçant eco-engagés. Cette Charte fait le point sur des questions aussi diverses que les déchets, l'énergie, la logistique urbaine, la mobilité, la végétalisation. Nous avons pour le moment 40 signataires, et nous nous donnons l'objectif d'atteindre rapidement la centaine. La mise en place de cette Charte fait suite au recrutement il y a deux ans d'un animateur pour la transition écologique du commerce. C'était une première en France.

Jérôme Decoster, qui nous a rejoint, a pour missions de sensibiliser les commerçants à des pratiques plus vertueuses et plus respectueuses du développement durable. Il a accompagné 85 entreprises sur ces questions. Il réalise un diagnostic flash avec des points hyper-concrets sous forme de recommandations : fermer les portes quand la climatisation ou le chauffage sont en route, éteindre les lumières la nuit, utiliser des ampoules led, limiter la distribution de sacs, réduire la quantité de déchets, etc. Il cherche à montrer que ce n’est pas compliqué, que c'est accessible à tous. Il organise aussi des rencontres et ateliers thématiques.

Remise des Chartes Eco-Engagés aux commerçants membres de Plein Centre, au cours d'un After-Work
 

Sur la question climatique, il y a une demande réelle des clients, aujourd'hui, il y a aussi des constats que nous faisons l'été, où les rues écrasées de lumière et de chaleur ne sont plus propices à la vente, nous pensons donc qu'il faut y aller, il faut évoluer dans nos pratiques, c'est de notre intérêt. Je ne crois pas aux injonctions, nous cherchons à accompagner les commerçants, dans l’écoute et la bienveillance, mais avec ambition.

Une question maintenant sur votre territoire. Quel est votre port d’attache? Est-ce que vous pouvez décrire votre relation à ce territoire? Ce qu’il vous apporte? Ce que vous lui apportez?

Notre territoire, c'est l'hyper-centre de Nantes, avec sa clientèle située jusqu’à une heure du centre-ville, soit, la métropole de Nantes au sens large. C'est un territoire constitué de commerces, de restaurants (il y a 500 restaurants à Nantes!), de bars, d'hôtels, mais aussi d'institutions culturelles, de patrimoine, d'espaces urbains ouverts et partagés, de sites touristiques, etc. Nous avons tous notre rôle à jouer. Je rêve que nous puissions tous nous retrouver pour tracer ensemble une trajectoire pour rendre notre ville plus attractive, plus agréable, plus fréquentée.

Tout le monde doit avancer ensemble. Quand la ville décide de supprimer les parking gratuits du centre-ville, pour inciter tout le monde à venir en transports en communs, qu'est ce que je dis au personnel qui rentre au milieu de la nuit et qui ne peut pas prendre les transports en commun, car, à cette heure-là, il n'y en a plus, et qui ne peut pas non plus payer les places de parking ? De toutes façons, je ne me vois pas dire à la serveuse de prendre le tram, puis le bus pour rentrer chez elle à 2 heures du matin ! Il faut que les décisions soient vues avec toutes leurs conséquences et qu'on retarde, qu'on recale, quand on trouve quelque chose qui coince.

Auprès de qui ou de quoi allez-vous puiser votre énergie quand vous en avez besoin (familier, ami, musicien, artiste, romancier, ville, lieu secret, etc.)?

Mon énergie, je la puise sans aucun doute dans l’échange, le partage et le soutien aux autres. Je pense en particulier au temps que je peux passer en ce moment pour aider un confrère à sortir de la mauvaise passe dans laquelle il se trouve. Cela m'apporte une grande satisfaction .

Pouvez-vous évoquer pour nous votre plus bel accomplissement professionnel ?

Le compagnonnage m'a marqué, profondément. Ce moment où l'on doit donner le meilleur de soit-même, réaliser son chef d'oeuvre, tout en étant accompagné pour y arriver, la reconnaissance, la transmission, l'amour du travail bien fait, autant de valeurs que je souhaite transmettre à mon tour.

Et le pas-de-côté que vous n’avez pas encore fait, et que vous aimeriez faire?

Certains jours, j'ai envie de renverser la table. Quand j'assiste à des réunions qui tournent en rond, qui n'aboutissent à rien de concret, où tout est bouclé à l'avance, j'ai vraiment envie de tout balayer et de sortir du politiquement correct.

Vous avez adhéré à NOVABUILD en 2020, qu'en attendez-vous ?

C'est avec l'échange qu'on progresse. On voit bien aujourd'hui que la ville évolue. Je parlais tout à l'heure du retour du végétal dans certaines rues, on voit bien que tout cela est complexe. Il faut emmener tout le monde. Etre à NOVABUILD nous permet d'être en veille sur certaines évolutions, d'attirer l'attention des professionnels de l'immobilier sur nos attentes, de partager une vision de ce qu'il faut faire pour demain.

Je vous remercie.

 

Propos recueillis par Pierre-Yves Legrand, directeur de Novabuild, le 26 octobre 2020

 

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